viernes, 1 de mayo de 2020

Arthur Rimbaud

NOVELA
Nadie es serio a los 17 años.
Una hermosa tarde, harto de cervezas y de limonadas
De cafés ruidosos con lámparas brillantes
Caminas bajo los verdes tilos del paseo.

Qué bien huelen los tilos en los atardeceres de junio
El aire es tan dulce que cierra los párpados
El viento cargado de ruidos — la ciudad no está lejos —
Tiene perfumes de vid y perfumes de cerveza.

De pronto divisas un trapo muy pequeño,
De azul sombrío, ceñido por una rama diminuta
Picado por una mala estrella, que se funde
Con suaves estremecimientos, pequeña y muy blanca…

Noche de junio, 17 años, te dejas embriagar
La savia es champagne que se sube a la cabeza
Se divaga, se siente un beso en los labios
Que palpita, como un animalito.

El corazón loco Robinsonea entre novelas
Cuando a la luz de una farola
Muy pálida pasa una dama de aspecto encantador
a la sombra del espantoso cuello postizo de su padre.

Y como te encuentra inmensamente ingenuo
Se vuelve, apresura el trote de sus pequeños botines
Alerta, y con movimiento vivaz…
Sobre tus labios mueren las cavatinas.

Estás enamorado: ocupado hasta el mes de agosto
Estás enamorado: tus sonetos la hacen reír
Tus amigos te rehúyen: eres de mal gusto
Después la adorada, una tarde, se digna a escribirte.

Esa tarde vuelves a los cafés deslumbrantes
Pides cerveza, o limonada
Nadie es serio a los 17 años
Cuando hay tilos verdes en el paseo.





La imagen puede contener: una persona, gafas de sol
Arthur Rimbaud , poeta francés 


Roman

I
On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans.
- Un beau soir, foin des bocks et de la limonade,
Des cafés tapageurs aux lustres éclatants !
- On va sous les tilleuls verts de la promenade.

Les tilleuls sentent bon dans les bons soirs de juin !
L'air est parfois si doux, qu'on ferme la paupière ;
Le vent chargé de bruits - la ville n'est pas loin -
A des parfums de vigne et des parfums de bière...

II
- Voilà qu'on aperçoit un tout petit chiffon
D'azur sombre, encadré d'une petite branche,
Piqué d'une mauvaise étoile, qui se fond
Avec de doux frissons, petite et toute blanche...

Nuit de juin ! Dix-sept ans ! - On se laisse griser.
La sève est du champagne et vous monte à la tête...
On divague ; on se sent aux lèvres un baiser
Qui palpite là, comme une petite bête...

III
Le coeur fou robinsonne à travers les romans,
- Lorsque, dans la clarté d'un pâle réverbère,
Passe une demoiselle aux petits airs charmants,
Sous l'ombre du faux col effrayant de son père...

Et, comme elle vous trouve immensément naïf,
Tout en faisant trotter ses petites bottines,
Elle se tourne, alerte et d'un mouvement vif...
- Sur vos lèvres alors meurent les cavatines...

IV
Vous êtes amoureux. Loué jusqu'au mois d'août.
Vous êtes amoureux. - Vos sonnets La font rire.
Tous vos amis s'en vont, vous êtes mauvais goût.
- Puis l'adorée, un soir, a daigné vous écrire !...

- Ce soir-là..., - vous rentrez aux cafés éclatants,
Vous demandez des bocks ou de la limonade...
- On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans
Et qu'on a des tilleuls verts sur la promenade.





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